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JOURNAL OFFICIEL N°72 DU 24 AU 30 JUIN 2020 DU 24 JUIN 2020

Décision N° 015/CC du 24/03/2020 Relative à la requête présentée par le Premier Ministre tendant au contrôle de constitutionnalité de la loi n°013/2019 portant suppression de certains services publics


 

AU NOM DU PEUPLE GABONAIS ;

LA COUR CONSTITUTIONNELLE ;

 

            Vu la requête enregistrée au Greffe de la Cour le 10 janvier 2020, sous le n°418/GCC, par laquelle le Premier Ministre a déféré à la Cour Constitutionnelle, aux fins de contrôle de constitutionnalité, la loi n°013/2019 portant suppression de certains services publics ;

            Vu la Constitution ;

            Vu la loi organique n°9/91 du 26 septembre 1991 sur la Cour Constitutionnelle, modifiée par la loi organique n°004/2018 du 30 juillet 2018 ;

            Vu le règlement de procédure de la Cour Constitutionnelle n°035/CC/06 du 10 novembre 2006, modifié par le règlement de procédure de la Cour Constitutionnelle n°047/CC/2018 du 20 juillet 2018 ;

            Vu la décision Avant-Dire-Droit n°010/CC du 10 février 2020 ;

             Le Rapporteur ayant été entendu ;

 

            1-Considérant que par requête susvisée, le Premier Ministre a déféré à la Cour Constitutionnelle, aux fins de contrôle de constitutionnalité, la loi n°013/2019 portant suppression de certains services publics ;

 

Sur l'article 5

 

            2-Considérant que l'article 5 de la loi n°013/2019 portant suppression de certains services publics en examen dispose : « Sont abrogés : la loi n°004/2009 du 9 février 2010 portant création, organisation et fonctionnement du Fonds Forestier National, la loi n°16/2004 du 6 janvier 2005 portant création, organisation et fonctionnement du Fonds National pour le Développement du Sport, la loi n°19/82/PR du 24 janvier 1983 portant création de l'Agence Nationale de Promotion Artistique et Culturelle, l'article 6 tiret 2 de la loi n°1/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public, la loi n°007/71/PR/MINECO du 16 décembre 1971 portant création du Conseil Gabonais des Chargeurs, la loi n°1/88 portant création du Centre Gabonais de Promotion Touristique, l'ordonnance n°5/76 du 20 janvier 1976 créant le Centre National Antipollution, le décret n°0272/PR du 6 février 2013 portant création et organisation de la Commission Nationale d'Organisation et de Gestion des Evènements et Manifestations à Caractère National et International, le décret n°0375/PR/MAEPSA du 21 octobre 2014 portant création et organisation de l'Agence Nationale des Pêches et de l'Aquaculture, le décret n°00254/PR/MAEPG du 22 août 2017 portant création, attributions, organisation et fonctionnement de l'Autorité de Régulation des Produits Agricoles du Gabon, le 2ème tiret de l'article 11 de la loi n°002/2014 du 1er août 2014 portant orientation du développement durable en République Gabonaise, le chapitre 2 du titre 4 de la loi n°002/2014 du 1er août 2014 portant orientation du Développement Durable en République Gabonaise, les articles 8 à 11 du décret n°252/PR/MFAS du 19 juin 2012 portant organisation du régime de mise en œuvre de l'aide sociale et de la protection sociale, le décret n°0128/PR du 22 janvier 2013 portant création du Bureau de Coordination du Plan Stratégique Gabon Emergent, le décret n°1019/PR/MECIT du 24 août 2011 portant création et organisation du Fonds de Garantie de Logement. » ;

 

            3-Considérant, d'une part, que si la loi en examen a pour vocation la suppression de certains services publics de l'Etat, force est cependant de constater que cette loi à elle seule abroge plusieurs lois ayant des objets totalement différents, en même temps qu'elle supprime certaines dispositions d'autres lois ; que c'est ainsi que la loi en examen abroge la loi n°004/2009 du 9 février 2010 portant création, organisation et fonctionnement du Fonds Forestier National ; la loi n°16/2004 du 6 janvier 2005 portant création, attributions, organisation et fonctionnement du Fonds National pour le Développement du Sport ; la loi n°19/82/PR du 24 janvier 1983 portant création de l'Agence Nationale de Promotion Artistique et Culturelle ; la loi n°7/71/PR/MINECO du 16 décembre 1971 portant création d'un Conseil Gabonais des Chargeurs ; la loi n°1/88 du 29 décembre 1988 portant création du Centre Gabonais de Promotion Touristique, lesquelles lois portent chacune sur un objet différent et n'ont, par conséquent, aucun lien entre elles ; qu'en outre, la même loi, en supprimant l'article 6 tiret 2 de la loi n°1/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public ; le chapitre 2 du titre 4 et le 2ème tiret de l'article 11 de la loi n°002/2014 du 1er août 2014 portant Orientation du Développement Durable en République Gabonaise, modifie lesdits textes dont les dispositions non supprimées restent en vigueur, alors qu'il suffisait simplement de prendre une loi spécifique par matière traitée pour abroger les lois concernées ou modifier certaines dispositions d'autres lois ;

 

            4-Considérant, d'autre part, que la même loi n°013/2019 portant suppression de certains services publics abroge dans son contenu cinq décrets, à savoir, le décret n°0272/PR du 6 février 2013 portant création et organisation de la Commission Nationale d'Organisation et de Gestion des Evènements et Manifestations à Caractère National et International ; le décret n°0375/PR/MAEPSA du 21 octobre 2014 portant création et organisation de l'Agence Nationale des Pêches et de l'Aquaculture ; le décret n°00254/PR/MAEPG du 22 août 2017 portant création, attributions, organisation et fonctionnement de l'Autorité de Régulation des Produits Agricoles du Gabon ; le décret n°0128/PR du 22 janvier 2013 portant création et organisation du Bureau de Coordination du Programme Stratégique Gabon Emergent et le décret n°1019/PR/MECIT du 24 août 2011 portant création et organisation du Fonds de Garantie pour le Logement ; que par ailleurs, la loi en examen en supprimant, là aussi, les dispositions des articles 8 à 11 du décret n°252/PR/MFAS du 19 juin 2012 portant organisation du régime de mise en œuvre de l'aide sociale et de la protection de la famille, modifie ledit texte dont toutes les autres dispositions restent au demeurant en vigueur ;

 

            5-Considérant qu'il importe de rappeler que la procédure d'élaboration et d'adoption des lois veut que chaque loi ne traite que d'un seul sujet ; qu'ainsi, en cas de modification, d'abrogation ou lorsqu'il faut y apporter un complément ou encore supprimer certaines dispositions d'une loi, ce soit par le biais d'une autre loi, prise spécifiquement à cet effet et portant sur le même sujet, qu'il y est procédé ;

 

            6-Considérant, s'agissant des textes réglementaires, que c'est en application du même processus que les autorités compétentes adoptent ou modifient les décrets et arrêtés ou en suppriment certaines dispositions ; que cependant, il peut arriver que la loi modificative dispose différemment d'un texte réglementaire pris naguère pour l'application de la loi initiale; que dans ce cas, et en vertu du principe de la hiérarchie des normes, ledit texte réglementaire ne peut plus s'appliquer en l'état ; que le Gouvernement est alors tenu de prendre un nouveau texte réglementaire qui vient soit modifier, soit abroger le texte initial, soit en supprimer les dispositions contraires à la loi ;

 

            7-Considérant qu'il est constant, en l'espèce, que la loi n°013/2019 portant suppression de certains services publics déférée à la Cour Constitutionnelle, en même temps qu'elle abroge des lois qui toutes ont des objets différents, non sans modifier d'autres qui elles aussi traitent des sujets différents, va jusqu'à abroger dans son contenu des décrets tout en supprimant les dispositions de certains autres, lesquels décrets portent aussi sur des objets différents ; qu'en outre, les dispositions ainsi supprimées, du fait que les lois et décrets les contenant n'ont pas eux-mêmes fait l'objet de modification par des textes spécifiques pris à cet effet, continuent en réalité de figurer dans les normes concernées et demeurent donc en vigueur ;

  

            8-Considérant qu'il résulte de l'analyse qui précède que la loi n°013/2019 portant suppression de certains services publics contient des dispositions d'un tel mélange confus et désordonné qui la rendent tout simplement inapplicable ; qu'il convient, en conséquence, de la déclarer inconstitutionnelle ;

 

            9-Considérant qu'en application des dispositions des articles 33 et 34 de la loi organique sur la Cour Constitutionnelle, le Parlement et le Gouvernement doivent remédier à la situation juridique qui découle de la présente décision.

 

D E C I D E :

 

Article 1er : La loi n°013/2019 portant suppression de certains services publics est inconstitutionnelle.

 

Article 2 : Le Parlement et le Gouvernement doivent remédier à la situation juridique qui découle de la présente décision.

 

Article 3 : La présente décision sera notifiée au requérant, au Président de la République, au Président du Sénat, au Président de l'Assemblée Nationale et publiée au Journal Officiel de la République Gabonaise ou dans un journal d'annonces légales

 

            Ainsi délibéré et décidé par la Cour Constitutionnelle en sa séance du vingt quatre mars deux mille vingt où siégeaient :

 

-Madame Marie Madeleine MBORANTSUO, Président ;

-Monsieur Hervé MOUTSINGA,

-Madame Louise ANGUE,

-Monsieur Christian BIGNOUMBA FERNANDES,

-Madame Lucie AKALANE,

-Monsieur Jacques LEBAMA,

-Madame Afriquita Dolores AGONDJO, ép. BANYENA,

-Monsieur Edouard OGANDAGA,

-Monsieur Sosthène MOMBOUA, membres ; assistés de Maître Charlène MASSASSA MIPIMBOU, Greffier.

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