Journal Officiel

Maternité Allaitant

JOURNAL OFFICIEL N°80 DU 24 AOûT 2020

Décision N° 042/CC du 16/07/2020 relative à la requête du Premier Ministre tendant au contrôle de constitutionnalité de la loi n°011/2020 portant suppression de certaines dispositions de la loi n°1/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public


AU NOM DU PEUPLE GABONAIS ;

LA COUR CONSTITUTIONNELLE ;

Vu la requête enregistrée au Greffe de la Cour le 03 juillet 2020, sous le n°038/GCC, par laquelle le Premier Ministre a soumis à la Cour Constitutionnelle, en vue d'un contrôle de constitutionnalité, la loi n°011/2020 portant suppression de certaines dispositions de la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public ;

Vu la Constitution ;

Vu la loi organique n°9/91 du 26 septembre 1991 sur la Cour Constitutionnelle, modifiée par la loi organique n°004/2018 du 30 juillet 2018 ;            

Vu le règlement de procédure de la Cour Constitutionnelle n°035/CC/06 du 10 novembre 2006, modifié par le règlement de procédure de la Cour Constitutionnelle n°047/CC/2018 du 20 juillet 2018 ;

Le Rapporteur ayant été entendu ;

1-Considérant que par requête susvisée, le Premier Ministre a soumis à la Cour Constitutionnelle, en vue d'un contrôle de constitutionnalité, la loi n°011/2020 portant suppression de certaines dispositions de la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public ;

2-Considérant que l'article 2 de la loi en examen énonce : « Les dispositions des articles 5 à 7 de la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public sont supprimées » ;

3-Considérant qu'il résulte de l'instruction que les dispositions des articles 5 à 7, retirées de la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public, prévoient, d'une part, la création de la commission interministérielle de privatisation, appelée commission, et le comité de privatisation, dénommé comité, et, d'autre part, la prise des textes réglementaires pour déterminer l'organisation, les attributions et le fonctionnement de ces structures, en l'occurrence les décrets n°289/PR du 19 mars 1997 portant organisation, attributions et fonctionnement de la commission interministérielle de privatisation et n°287/PR du 19 mars 1997 portant organisation, attributions et fonctionnement du comité de privatisation ;

 4-Considérant que la suppression de la commission interministérielle de privatisation et du comité de privatisation ayant été actée par la loi en examen, il va de soi que ladite suppression rend désormais sans objet les décrets n°289/PR du 19 mars 1997 portant organisation, attributions et fonctionnement de la commission interministérielle de privatisation et n°287/PR du 19 mars 1997 portant organisation, attributions et fonctionnement du comité de privatisation ;

5-Considérant qu'aux termes des dispositions de l'alinéa 2 de l'article 40 de la loi organique sur la Cour Constitutionnelle, celle-ci peut soulever des moyens d'office lorsqu'elle contrôle la conformité à la Constitution d'une loi, en cas de violation manifeste d'un principe à valeur constitutionnelle ;

6-Considérant      qu'à l'examen de la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public, il est apparu que des articles de ladite loi réglementent la commission interministérielle de privatisation, tandis que d'autres prévoient exclusivement les sanctions pénales encourues par tout membre du comité de privatisation indélicat ; qu'il s'agit des articles 12, 13, 14, 15,16, 17 et 18 ;

 Sur les articles 12, 13, 14, 15, 16, 17 et 18

7-Considérant que l'article 12 de la loi en cause dispose : « Le prix de transfert de propriété est payable au comptant. Par dérogation et après avis de la commission, d'autres modes de paiement peuvent être accordés par décret pris en Conseil des Ministres. Ce décret en détermine les conditions, les modalités, ainsi que les mesures prises en cas de retard ou de non-paiement. » ;

8-Considérant que l'article 13 du même texte prévoit : « Pour toute opération de privatisation, l'Etat conserve de plein droit une action ordinaire.

Dans les conditions fixées par décret pris en Conseil des Ministres, sur proposition des Ministres chargés des Finances, d'une part, et des Privatisations, d'autre part, après avis conforme de la commission et lorsque la protection des intérêts nationaux l'exige, cette action peut être transformée en action spécifique.

L'action spécifique peut, à tout moment, être définitivement transformée en action ordinaire, après trois ans. » ;

9-Considérant que l'article 14 de la loi précitée édicté : « Sur la base des dispositions du paragraphe premier de l'article 13 ci-dessus, la commission peut agréer des prises de participation excédant 20% du capital par une ou plusieurs personnes du même groupe.

Les prises de participation excédant 20% du capital obtenues frauduleusement privent leurs détenteurs du droit de vote. Ceux-ci doivent, dans un délai de trois mois, céder leurs titres acquis correspondants.

Passé ce délai, il est procédé à la saisie et à la vente forcée des titres visés ci-dessus.

Un décret fixe les conditions de publicité et de procédure de cette vente forcée. » ;

10-Considérant que l'article 15 de la loi en cause dispose : « Sera puni d'une peine d'emprisonnement de trois mois à un an et d'une amende de un à cinq millions de francs CFA, tout membre du comité qui, pendant la durée de ses fonctions et deux ans après, aura exercé directement ou indirectement un mandat social ou une activité rémunérée pour le compte d'une personne physique ou morale de droit gabonais ou étranger ayant été adjudicataire de l'un des appels d'offre émis dans le cadre du programme de privatisation visé à l'article 4 ci-dessus. » ;

11-Considérant que l'article 16 du même texte de loi énonce : « Sera puni d'une peine d'emprisonnement de trois à cinq ans et d'une amende de cinq à dix millions de francs CFA, tout membre du comité qui, pendant la durée de ses fonctions et deux ans après, aura reçu directement ou indirectement un avantage, de quelque nature que ce soit, de l'une des personnes physiques ou morales mentionnées à l'article 15 ci- dessus. » ;

12-Considérant que l'article 17 de la loi en cause prévoit : « Sera puni d'une peine d'emprisonnement de trois à cinq ans et d'une amende de dix à vingt millions de francs CFA, tout membre du comité qui aura, pendant la durée de ses fonctions et deux ans après, accepté directement ou indirectement de participer à la gestion ou à l'exploitation d'une entreprise faisant partie du programme de privatisation. » ;

13-Considérant que l'article 18 de la loi précitée prescrit : « Sera puni d'une peine d'emprisonnement de trois mois à un an et d'une amende de un à cinq millions de francs CFA, tout membre du comité qui, sans l'autorisation du gouvernement, aura divulgué, publié ou fait publier un écrit dont il a eu connaissance ou possession dans le cadre de ses fonctions. » ;

14-Considérant qu'il suit de là qu'en procédant uniquement à la suppression des articles 5 à 7 et en maintenant les dispositions des articles 12, 13, 14, 15, 16, 17 et 18 de la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public, la loi n°011/2020 en examen contrarie le principe d'applicabilité d'une loi ; qu'en conséquence, la loi querellée doit, d'une part, changer d'intitulé et, d'autre part, voir les articles 12, 13 et 14 autrement reformulés et enfin, les articles 15, 16, 17 et 18 supprimés ;

15-Considérant,  s'agissant de l'intitulé, que la loi n°011/2020 portera désormais le titre de : « Loi n°011/2020 portant modification de la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public » ;

16-Considérant,  par rapport aux articles 12, 13 et 14, qu'ils doivent se lire dorénavant ainsi qu'il suit :

« Article 12 nouveau : Le prix de transfert de propriété est payable au comptant. Par dérogation et sur proposition du Ministre en charge des Finances, d'autres modes de paiement peuvent être accordés par décret pris en Conseil des Ministres. Ce décret en détermine les conditions, les modalités, ainsi que les mesures prises en cas de retard ou de non-paiement. »

« Article 13 nouveau : Pour toute opération de privatisation, l'Etat conserve de plein droit une action ordinaire.

Dans les conditions fixées par décret pris en Conseil des Ministres, sur proposition des Ministres en charge des Finances, d'une part, et des Privatisations, d'autre part, et lorsque la protection des intérêts nationaux l'exige, cette action peut être transformée en action spécifique.

L'action spécifique peut, à tout moment, être définitivement transformée en action ordinaire, après trois ans » ;

« Article 14 nouveau : Sur la base des dispositions du paragraphe premier de l'article 13 ci-dessus, le Ministre en charge des Finances peut agréer des prises de participation excédant 20% du capital par une ou plusieurs personnes du même groupe.

Les prises de participation excédant 20% du capital obtenues frauduleusement privent leurs détenteurs du droit de vote. Ceux-ci doivent, dans un délai de trois mois, céder leurs titres acquis correspondants.

Passé ce délai, il est procédé à la saisie et à la vente forcée des titres visés ci-dessus.

Un décret fixe les conditions de publicité et de procédure de cette vente forcée. » ;

17-Considérant   que pour intégrer dans la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public les changements apportés au texte en examen, la numérotation des articles de la loi précitée ne sera plus la même ; qu'aussi, les anciens articles 12, 13 et 14 deviennent-ils respectivement articles 10, 11 et 12 ;

19-Considérant que toutes les autres dispositions de la loi en cause ne sont entachées d'aucune inconstitutionnalité ; qu'il échet donc de les déclarer conformes à la Constitution.

D E C I D E :

Article 1er : Le titre de la loi n°011/2020 portant suppression de certaines dispositions de la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public est modifié et se fit désormais ainsi qu'il suit : « Loi n°011/2020 portant modification de la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public ».

Article 2 : Les dispositions des articles 12, 13 et 14, devenues selon la nouvelle numérotation celles des articles 10, 11 et 12, sont conformes à la Constitution, sous réserve de les reformuler ainsi qu'il suit :

« Article 10 nouveau : Le prix de transfert de propriété est payable au comptant. Par dérogation et sur proposition du Ministre en charge des finances, d'autres modes de paiement peuvent être accordés par décret pris en Conseil des Ministres. Ce décret en détermine les conditions, les modalités, ainsi que les mesures prises en cas de retard ou de non-paiement. » ;

« Article 11 nouveau : Pour toute opération de privatisation, l'Etat conserve de plein droit une action ordinaire.

Dans les conditions fixées par décret pris en Conseil des Ministres, sur proposition des Ministres en charge des Finances, d'une part, et des Privatisations, d'autre part, et lorsque la protection des intérêts nationaux l'exige, cette action peut être transformée en action spécifique.

L'action spécifique peut, à tout moment, être définitivement transformée en action ordinaire, après trois ans. » ;

« Article 12 nouveau : Sur la base-des dispositions  du paragraphe premier de l'article 11 ci-dessus, le Ministre en charge des Finances peut agréer des prises de participation excédant 20% du capital par une ou plusieurs personnes du même groupe.

Les prises de participation excédant 20% du capital obtenues frauduleusement privent leurs détenteurs du droit de vote. Ceux-ci doivent, dans un délai de trois mois, céder leurs titres acquis correspondants.

Passé ce délai, il est procédé à la saisie et à la vente forcée des titres visés ci-dessus.

Un décret fixe les conditions de publicité et de procédure de cette vente forcée. ».

Article 3 : Les dispositions des articles 15, 16, 17 et 18 de la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public sont supprimées et séparées de l'ensemble du texte.

Article 4 : Du fait de la suppression des dispositions créant la commission interministérielle de privatisation et du comité de privatisation par la loi n°011/2020 portant modification de la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public, les décrets n°289/PR du 19 mars 1997 portant organisation, attributions et fonctionnement de la commission interministérielle de privatisation et n°287/PR du 19 mars 1997 portant organisation, attributions et fonctionnement du comité de privatisation sont désormais sans objet.

Article 5 : Les autres dispositions de la loi n°011/2020 portant modification de la loi n°l/96 du 13 février 1996 fixant les règles de privatisation des entreprises du secteur public sont conformes à la Constitution.

Article 6 : La présente décision sera notifiée au requérant, au Président de la République, au Président du Sénat, au Président de l'Assemblée Nationale, communiquée au Ministre du Budget et des Comptes Publics et publiée au Journal Officiel de la République Gabonaise ou dans un journal d'annonces légales.

Ainsi délibéré et décidé par la Cour Constitutionnelle en sa séance du seize juillet deux mille vingt où siégeaient :

 -Madame Marie Madeleine MBORANTSUO, Président ;

-Monsieur Hervé MOUTSINGA,

-Madame Louise ANGUE,

-Monsieur Christian BIGNOUMBA FERNANDES,

-Madame Lucie AKALANE,

-Monsieur Jacques LEBAMA,

-Madame Afriquita Dolorès AGONDJO, épse BANYENA,

-Monsieur Edouard OGANDAGA,

-Monsieur Sosthène MOMBOUA, membres ; assistés de Maître Nosthène NGUINDA, Greffier en Chef.

Abonnez-vous au Journal Officiel de la République Gabonaise

Inscrivez-vous et recevez votre exemplaire du journal Officiel de la république Gabonaise.