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JOURNAL OFFICIEL N°100 DU 24 JANVIER 2021

Décision N° 085/CC du 21/12/2020 relative à la requête présentée par le Premier Ministre, tendant au contrôle de constitutionnalité de la loi n°031/2020 portant création, attributions et organisation de l'Office National de Développement du Sport et de la Culture


AU NOM DU PEUPLE GABONAIS ;

LA COUR CONSTITUTIONNELLE ;

 

Vu la requête enregistrée au Greffe de la Cour le 18 novembre 2020, sous le n°091/GCC, par laquelle le Premier Ministre a déféré à la Cour Constitutionnelle, aux fins de contrôle de conformité à la Constitution, la loi n°031/2020 portant création, attributions et organisation de l'Office National de Développement du Sport et de la Culture ;

Vu la Constitution ;

Vu la loi organique n°9/91 du 26 septembre 1991 sur la Cour Constitutionnelle, modifiée par la loi organique n'004/2018 du 30 juillet 2018 ;

Vu la loi n°20/2005 du 3 janvier 2006 fixant les règles de création, d'organisation et de gestion des services de l'Etat ;

Vu le règlement de procédure de la Cour Constitutionnelle n°035/CC/06 du 10 novembre 2006, modifié par le règlement de procédure de la Cour Constitutionnelle n°047/CC/2018 du 20 juillet 2018 ;

Vu le mémoire en réplique en date du 8 décembre 2020, des Ministres en charge des Sports et de la Culture ;

Vu la décision Avant Dire Droit n°079 bis/CC en date du 7 décembre 2020 ;

 

Le Rapporteur ayant été entendu ;

 

1-Considérant que par requête susvisée, le Premier Ministre a déféré à la Cour Constitutionnelle, aux fins de contrôle de conformité à la Constitution, la loi n°031/2020 portant création, attributions et organisation de l'Office National de Développement du Sport et de la Culture ;

2-Considérant qu'à l'appui de cette requête, les Ministres en charge respectivement des Sports et de la Culture ont fait valoir, dans leurs écritures enregistrées au Greffe de la Cour le 8 décembre 2020, sur le statut juridique de l'Office National de Développement du Sport et de la Culture, que celui-ci obéit aux dispositions des articles 4 et 29 de la loi n°20/2005 du 3 janvier 2006 susvisée, lesquelles dispositions définissent respectivement la notion de service public de l'Etat et celle de service public de l'Etat à autonomie de gestion ; qu'ils précisent que la nouvelle entité a vocation à réaliser des opérations de vente de produits et services liés aux activités de stratégies commerciales correspondant à la compétence matérielle de l'Office ;

3-Considérant relativement aux missions propres de l'Office National de Développement du Sport et de la Culture, que les Ministres en charge des Sports et de la Culture soutiennent que celui-ci finance le développement du sport et la promotion de la culture ; qu'à ce titre, l'Office finance, entre autres, le développement de la pratique du sport et la promotion des activités culturelles et artistiques, les activités des fédérations, ligues et associations sportives, l'entretien des équipements et infrastructures sportifs et culturels ;

4-Considérant, par rapport au détachement des agents permanents de l'Etat auprès de l'Office, qu'ils indiquent qu'il ne s'agit là que de l'application des dispositions de l'article 82 de la loi n°8/91 du 26 septembre 1991 portant statut général des fonctionnaires qui permettent cette pratique ; que, pour ce qui est de la dénomination de la nouvelle entité en tant qu'Office plutôt qu'Agence, deux notions qui pour eux sont techniquement proches, ils affirment que ce choix obéit à une logique politique ; que concernant le fait que l'Office soit soumis aux règles de la Comptabilité Publique et qu'il bénéficie des prérogatives de puissance publique, ils soulignent que cela est conforme aux dispositions de l'article 42 de la loi n°20/2005 du 3 janvier 2006 susvisée ;

5-Considérant, au sujet de la non prise en compte dans la loi en examen de certaines spécificités du secteur de la culture, qu'ils expliquent que les textes d'application qui seront pris après la promulgation de la loi viendront en préciser la teneur ; qu'en conclusion, ils sollicitent de la Cour Constitutionnelle que celle-ci déclare conforme à la Constitution la loi n°031/2020 portant création, attributions et organisation de l'Office National de Développement du Sport et de la Culture, soumise à son contrôle ;

Sur les articles 2 et 4

6-Considérant que l'article 2 de la loi n°031/2020 portant création, attributions et organisation de l'Office National de Développement du Sport et de la Culture en examen, stipule : « Il est créé, dans les domaines du sport et de la culture, un établissement public à caractère industriel et commercial, doté de la personnalité juridique et jouissant de l'autonomie administrative et financière dénommé « Office National de Développement du Sport et de la Culture », en abrégé ONDSC, ci-après désigné l'Office. » ;

7-Considérant que l'article 4 de la même loi dispose : « L'Office a pour mission de contribuer au développement du sport et à la promotion de la culture.

A cet effet, il est notamment chargé :

-de contribuer au développement de la pratique du sport et à la promotion des activités culturelles, en collaboration avec les organismes concernés ;

-de contribuer au financement des activités des fédérations, ligues, associations sportives, culturelles, de jeunesse, de la vie associative et des loisirs reconnus par l'Etat ;

-de faciliter et accompagner l'organisation des évènements culturels et sportifs, à caractère national et international, en collaboration avec les administrations et partenaires concernés ;

-de contribuer à la promotion et à la diffusion des évènements sportifs et culturels en partenariat avec les administrations compétentes ;

-de contribuer à la construction, au développement, à l'entretien, à la gestion, à l'exploitation des équipements et infrastructures sportifs, culturels et socio-éducatifs, en collaboration avec les administrations et organismes compétents ;

-de contribuer à l'acquisition, en collaboration avec les administrations concernées, du matériel, des biens d'équipements sportifs, culturels et socio-éducatifs ;

-de proposer des mécanismes innovants de promotion, de gestion, de financement et d'entretien des infrastructures construites ou confiées par l'Etat ;

de contribuer au financement des mouvements associatifs et de jeunesse pour les activités socio-éducatives. » ;

8-Considérant que l'article 42 de la loi n°20/2005 du 3 janvier 2006 susvisée, qui est une loi de portée générale et, de ce fait, à valeur constitutionnelle, énonce en son alinéa ler: « Les établissements publics à caractère industriel et commercial sont des services publics personnalisés chargés d'une mission d'intérêt général spécifique et, pour ce faire, ils sont chargés de réaliser des opérations industrielles et commerciales de production, de transformation ou d'échange. » ;

9-Considérant qu'en application des dispositions précitées de l'alinéa ler de l'article 42 de la loi n°20/2005 du 3 janvier 2006 susvisée, l'Office National de Développement du Sport et de la Culture, en tant qu'établissement public à caractère industriel et commercial, doit avoir des missions propres qui se rapportent à son objet, doit réaliser des opérations industrielles et commerciales de production et de transformation et disposer des règles de gestion propres de son patrimoine ;

10-Considérant qu'au contraire de ces exigences légales qui s'imposent à tout établissement public à caractère industriel et commercial, tel que c'est le cas de l'Office, il ressort de l'analyse des dispositions ci-avant énoncées de l'article 4 de la loi soumise au contrôle de la Cour que l'Office National de Développement du Sport et de a Culture n'a pas de missions spécifiques puisqu'il n'apporte au développement du Sport et à la promotion de la culture qui, au demeurant n’est ni définie ni qualifiée; qu'en outre, la loi en examen n'est pas explicite sur les opérations industrielles et commerciales de production, de transformation à réaliser par l'Office ; qu'il suit de là que les dispositions de l'article 4 doivent être déclarées inconstitutionnelles ;

Sur les articles 8 et 9

11- Considérant que l'article 8 de la loi en examen stipule : « Le Compte d'Affectation Spécial antérieurement dénommé Fonds National pour le Développement du Sport est renommé Fonds National pour le Développement du Sport et de la Culture et transféré à l'Office. » ; que l'article 9 de cette même loi édicte, pour sa part, que : « L'Office est alimenté par les ressources du Compte d'Affectation Spécial dénommé Fonds National pour le Développement du Sport et de la Culture comprenant :

-les subventions et dotations budgétaires de l'Etat et des autres collectivités publiques ;

-les recettes affectées des droits d'accises, taxes, redevances, pénalités et amendes transactionnelles prévues par les textes en vigueur ;

-les prélèvements sur la billetterie des évènements sportifs et culturels et sur les droits de retransmission télévisée des évènements sportifs et culturels internationaux ;

-les contributions des partenaires au développement.

Les ressources de l'Office comprennent en outre :

-les recettes provenant des locations des infrastructures sportives, culturelles et socio-éducatives de l'Etat ; les ressources issues de ses activités ;

-les revenus de billetterie des musées et espaces culturels ;

-les dons et legs. » ;

12-Considérant qu'il appert de l'instruction que la loi n°015/2020 du 17 juillet 2020 a supprimé le Fonds National pour le Développement du Sport et de la Culture et, partant, le Compte d'Affectation Spécial qui alimentait ledit Fonds ; qu'il suit de là que des fonds qui n'existent plus ne peuvent pas constituer des ressources d'un autre organisme sans violer les règles de la comptabilité publique ; qu'en conséquence, les dispositions des articles 8 et 9 ci-dessus rappelées doivent également être déclarées inconstitutionnelles ;

13-Considérant que les dispositions des articles 4, 8 et 9 ainsi censurées sont inséparables de l'ensemble des autres dispositions de la loi n°031/2020 portant création, attributions et organisation de l'Office National de Développement du Sport et de la Culture ; qu'en vertu des dispositions de l'alinéa 3 de l'article 34 de la loi organique sur la Cour Constitutionnelle, la loi soumise au contrôle de celle-ci doit être déclarée inconstitutionnelle et ne peut, de ce fait, être promulguée.

 

D E C I D E :

 

Article 1er : Les dispositions des articles 4, 8 et 9 de la loi n°031/2020 portant création, attributions et organisation de l'Office National de Développement du Sport et de la Culture sont inconstitutionnelles.

Article 2 : Les dispositions ainsi censurées sont inséparables de l'ensemble des autres dispositions de la loi n°031/2020 portant création, attributions et organisation de l'Office National de Développement du Sport et de la Culture.

Article 3 : La loi n°031/2020 portant création, attributions et organisation de l'Office National de Développement du Sport et de la Culture est inconstitutionnelle et ne peut, de ce fait, être promulguée.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au requérant, au Président de la République, au Président du Sénat, au Président de l'Assemblée Nationale et publiée au Journal Officiel de la République Gabonaise ou dans un journal d'annonces légales.

Ainsi délibéré et décidé par la Cour Constitutionnelle en sa séance du vingt-un décembre deux mille vingt où siégeaient : 

-Madame Marie Madeleine MBORANTSUO„ Président ;

-Monsieur Hervé MOUTSINGA,

-Madame Louise ANGUE,

-Monsieur Christian BIGNOUMBA FERNANDES,

-Madame Lucie AKALANE,

-Monsieur Jacques LEBAMA,

-Madame Afriquita Dolorès AGONDJO, ép. BANYENA,

-Monsieur Edouard OGANDAGA,

-Monsieur Sosthène MOMBOUA, membres ; assistés de Maître Charlène MASSASSA MIPIMBOU, Greffier.

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