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JOURNAL OFFICIEL N°121 DU 1 JUILLET 2021

Décision N° 005/CC du 27/05/2021 relative à la requête présentée par Monsieur DIOP O'NGWERO, tendant au contrôle de constitutionnalité des dispositions de l'article 22 de la loi organique n°9/2019 du 05 juillet 2019 portant organisation de la justice en République Gabonaise


AU NOM DU PEUPLE GABONAIS ;

LA COUR CONSTITUTIONNELLE ;

 

Vu la requête enregistrée au Greffe de la Cour le 09 avril 2021, sous le numéro 002/GCC, par laquelle Monsieur DIOP O'NGWERO, Avocat au Barreau du Gabon, demeurant à Libreville, B.P : 4451, a saisi la Cour Constitutionnelle, par voie d'exception, aux fins de voir déclarer inconstitutionnelles les dispositions de l'article 22 de la loi organique n°9/2019 du 05 juillet 2019 portant organisation de la justice en République Gabonaise ;

Vu la Constitution ;

Vu la loi organique n°09/91 du 26 septembre 1991 sur la Cour Constitutionnelle, modifiée par la loi organique n°004/2018 du 30 juillet 2018 ;

Vu le règlement de procédure de la Cour Constitutionnelle n°035/CC/06 du 10 novembre 2006, modifié par le règlement de procédure de la Cour Constitutionnelle n°047/CC/2018 du 20 juillet 2018 ;

Vu la décision Avant-Dire-Droit de la Cour Constitutionnelle n°004/CC du 06 mai 2021 ;

 

Le Rapporteur ayant été entendu ;

 

1-Considérant que par requête susvisée, Monsieur DIOP O'NGWERO, Avocat au Barreau du Gabon, demeurant à Libreville, BP 4451, a saisi la Cour Constitutionnelle, par voie d'exception, aux fins de voir déclarer inconstitutionnelles les dispositions de l'article 22 de la loi organique n°9/2019 du 05 juillet 2019 portant organisation de la justice en République Gabonaise ;

2-Considérant que Monsieur DIOP O'NGWERO expose au soutien de sa requête que l'article 22 de la loi organique n°9/2019 du 05 juillet 2019 portant organisation de la justice en République Gabonaise édicte : « Seuls les Avocats inscrits au Grand Tableau de l'Ordre des Avocats du Barreau du Gabon depuis au moins dix ans peuvent postuler ou plaider devant la Cour de Cassation. Le Bâtonnier de l'ordre des Avocats au début de chaque année judiciaire adresse au Président de la Cour de Cassation la liste des Avocats remplissant cette condition.

Les Avocats admis prêtent devant la Cour de Cassation le serment suivant :

« Je jure d'exercer mon office d'Avocat à la Cour de Cassation avec dignité, indépendance, conscience, probité, délicatesse et loyauté. » ; qu'il explique que le 19 mars 2021, la Cour de Cassation a organisé une audience solennelle pour recevoir le serment desdits avocats ; qu'à l'appel de son nom, il a soulevé l'exception d'inconstitutionnalité à l'encontre de cet article 22 de la loi organique n°9/2019 du 05 juillet 2019 et a demandé à la Cour de Cassation de noter l'incident puis de le déférer devant la Cour Constitutionnelle où il déposerait son mémoire ;

3-Considérant, s'agissant de la recevabilité de sa requête, que Monsieur DIOP O'NGWERO qui fonde sa saisine sur les dispositions des articles 1 à 3 et 45 de la loi organique sur la Cour Constitutionnelle argue principalement de ce que l'exception d'inconstitutionnalité a été soulevée à l'encontre de l'article 22 précité auquel il est fait grief de distinguer les avocats selon qu'ils ont 10 ans au moins d'ancienneté et de rompre ainsi le principe du traitement d'égalité desdits avocats ; qu'il sollicite subsidiairement de la Cour Constitutionnelle que celle-ci le relève de la forclusion liée à la distinction de la saisine par voie d'action ou par voie d'exception ;

4-Considérant relativement au fond que Monsieur DIOP O'NGWERO fait l'historique du serment de l'avocat et rappelle que celui-ci emprunte sa source à une origine religieuse avant de revenir à l'institution par l'ordonnance n°40/72 du 17 avril 1972 du Barreau du Gabon ; qu'il souligne que dans ce texte fondamental le serment n'apparait qu'une fois pour défendre son caractère unique ;

5-Considérant que le requérant soutient que le législateur a renié son texte de l'article 22 de la loi organique de 2019 en ce que l'article 24 nouveau de la loi n°0022/2020 du 17 juillet 2020 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi n°13/2014 du 7 janvier 2015 fixant le cadre d'exercice de la profession d'avocat en République Gabonaise énonce : « Le postulant admis en stage prête à la diligence du Bâtonnier du Barreau National, le serment suivant :

« Je jure d'exercer ma profession d'avocat avec dignité, conscience, indépendance, probité et loyauté dans le strict respect des lois et règlements en vigueur ». Cette prestation de serment se fait devant la Cour de Cassation réunie en assemblée plénière. » ; qu'il indique que les avocats qui ont prêté serment le 19 mars 2021 n'ont pas été présentés par le Bâtonnier ni par les suppléants du Conseil de l'Ordre et dénonce l'irrégularité entachant ainsi ce serment ;

6-Considérant que Monsieur DIOP O'NGWERO fustige le subjectivisme injustifié ayant conduit à cette nouvelle prestation de serment, laquelle a abouti, selon lui, à la discrimination des avocats et à la violation de l'égalité de traitement de ces derniers ; que fort de tout ce qui précède, il sollicite de la Cour Constitutionnelle qu'elle annule les dispositions critiquées ;

Sur le texte attaqué

7-Considérant que Monsieur DIOP O'NGWERO soumet au contrôle de la Cour Constitutionnelle les dispositions de l'article 22 de la loi organique n°9/2019 du 05 juillet 2019 portant organisation de la justice en République Gabonaise, lesquelles, selon lui, disposent ainsi qu'il suit : « Seuls les Avocats inscrits au Grand tableau de l'Ordre des Avocats du Barreau du Gabon depuis au moins dix (10) ans peuvent postuler ou plaider devant la Cour de Cassation... » ;

8-Considérant cependant qu'il résulte de l'instruction que l'article 22 de la loi organique n°9/2019 du 05 juillet 2019 portant organisation de la justice en République Gabonaise dispose : « Des textes législatifs et réglementaires déterminent en tant que de besoin les dispositions de toute nature nécessaires à l'application de la présente loi organique » ; qu'à l'évidence le libellé de cet article diffère de la formulation du texte attaqué par le requérant, lequel correspond en réalité aux dispositions de l'article 22 de la loi organique n°8/2019 du 05 juillet 2019 fixant l'organisation, la composition, la compétence et le fonctionnement des juridictions de l'ordre judiciaire ; qu'il s'en suit, qu'il y a erreur manifeste sur le libellé du texte déféré à la Cour ;

Sur la recevabilité de la requête

9-Considérant que lors de son audition au cours de l'instruction, Monsieur DIOP O'NGVVERO a confirmé les termes de sa requête en précisant qu'il a saisi la Cour Constitutionnelle par voie d'exception car il avait déjà soulevé une exception d'inconstitutionnalité devant la Cour de Cassation à l'encontre des dispositions de l'article 22 de la loi organique n°9/2019 du 05 juillet 2019 portant organisation de la justice en République Gabonaise à l'occasion de l'audience de prestation de serment des avocats tenue par cette juridiction le 19 mars 2021 ; qu'il a ajouté que cette réunion de l'assemblée plénière de la Cour de Cassation répond bien à la notion de procès au sens de l'article 45 de la loi organique sur la Cour Constitutionnelle ;

10-Considérant que Monsieur DIOP O'NGWERO sollicite subsidiairement de la Cour Constitutionnelle qu'elle le relève de la forclusion liée à la distinction de la saisine par voie d'action ou par voie d'exception ; qu'il demande en fait à la Cour Constitutionnelle de déclarer recevable sa requête en dépit du fait que celle-ci n'a pas été régulièrement saisie par la Cour de Cassation conformément aux dispositions de l'article 46 de la loi organique sur la Cour Constitutionnelle ;

11-Considérant que l'article 45 de la loi organique sur la Cour Constitutionnelle dispose : « La conformité à la Constitution d'une loi après sa promulgation ou d'une ordonnance qui n'aurait pas été soumise à la Cour Constitutionnelle et qui méconnaitrait les droits fondamentaux de tout justiciable peut être vérifiée, par cette Cour, saisie à l'occasion d'un procès devant toute juridiction. L'exception d'inconstitutionnalité doit sous peine d'irrecevabilité être soulevée dès l'ouverture des débats. » ; que l'article 46 de la même loi organique édicte : « La juridiction devant laquelle une exception d'inconstitutionnalité est soulevée saisit la Cour Constitutionnelle par voie d'exception préjudicielle. Elle surseoit à statuer. L'exception d'inconstitutionnalité peut être soulevée dans les mêmes formes et conditions à l'occasion de l'exercice de toute voie de recours » ;

12-Considérant qu'il découle de tout ce qui précède qu'en matière de contrôle de constitutionnalité des lois et ordonnances par voie d'exception, la Cour ne peut être saisie directement par un justiciable qu'en conséquence, la requête de Monsieur DIOP O'NGWERO doit être déclarée irrecevable.

 

D E C I D E :

 

Article 1er : La requête présentée par Monsieur DIOP O'NGWERO est irrecevable.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au requérant, au Président de la République, au Premier Ministre, au Président du Sénat, au Président de l'Assemblée Nationale, communiquée au Président de la Cour de Cassation, au Bâtonnier de l'Ordre des Avocats du Barreau du Gabon et publiée au Journal Officiel de la République Gabonaise ou dans un journal d'annonces légales.

Ainsi délibéré et décidé par la Cour Constitutionnelle en sa séance du vingt-sept mai deux mille vingt et un où siégeaient : 

-Madame Marie Madeleine MBORANTSUO, Président ;

-Monsieur Emmanuel NZE BEKALE,

-Madame Louise ANGUE,

-Monsieur Christian BIGNOUMBA FERNANDES,

-Madame Lucie AKALANE,

-Monsieur Jacques LEBAMA,

-Madame Afriquita Dolorès AGONDJO ép. BANYENA,

-Monsieur Edouard OGANDAGA,

-Monsieur Sosthène MOMBOUA, membres ; assistés de Maître Jean Laurent TSINGA, Greffier en Chef.

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