L'Assemblée Nationale et le Sénat ont délibéré et adopté,
Le Président de la République, Chef de l'Etat,
Promulgue la loi dont la teneur suit :
Article 1er : La présente loi, prise en application des dispositions de l'article 47 de la Constitution, fixe les règles relatives au Domaine Routier National.
TITRE I : DES DISPOSITIONS GENERALES
Chapitre Ier : Des définitions
Article 2 : Au sens de la présente loi et des textes pris pour son application, on entend par :
-Domaine routier : ensemble des voies publiques aménagées sur le territoire national ;
-Voie publique : route aménagée et appartenant à l'Etat ou à une collectivité locale et affectée à la circulation publique ;
-Voirie : ensemble des voies de circulation terrestres et de leur dépendances, aménagé à l'échelle nationale ou locale.
-Route : infrastructure aménagée par l'Etat ou une collectivité locale et destinée à la circulation des personnes et des biens, avec ou sans véhicule et comprenant, dans son emprise, des dépendances principales et accessoires, notamment :
-Plan d'alignement : document graphique à valeur réglementaire qui fixe les deux limites longitudinales, existantes ou anticipées, d'une voie publique.
-Servitude d'alignement : restriction faite au propriétaire d'une construction dépassant les limites du plan d'alignement, de faire des constructions nouvelles, des surélévations ou des travaux confortatifs sur ladite construction.
-Servitude de reculement : restriction créée à la charge d'une propriété riveraine d'une voie publique, interdisant de procéder à des travaux pouvant prolonger la durée d'une construction dépassant les nouvelles limites d'une voie publique, en cas d'élargissement.
-Classification : acte consistant à incorporer une voie à l'une des catégories de voies publiques instituées par la présente loi.
-Classement : acte qui autorise l'incorporation d'un bien dans le domaine public de l'Etat ou d'une collectivité locale.
-Déclassement : acte qui a pour objet, suite au constat de la désaffectation d'une voie publique, de faire sortir celle-ci du domaine public, et de la transférer dans le domaine privé de la personne publique propriétaire.
-Affectation : acte qui consiste à soumettre une route à un usage précis.
-Désaffectation : acte qui consiste à soustraire une route de l'usage auquel il était soumis ; la désaffectation est de fait tant qu'elle n'a pas fait l'objet d'un acte administratif par l'autorité compétente.
Chapitre II : De la classification des voies publiques
Article 3 : Le Domaine Routier National ou voirie nationale comprend l'ensemble des voies publiques aménagées sur le territoire national.
Article 4 : Les voies publiques sont classées en cinq catégories :
-les Autoroutes et voies Express, identifiées respectivement par les initiales A et VE ;
-les Routes Nationales, identifiées par les initiales RN ;
-les Routes Provinciales, identifiées par les initiales RP ;
-les Routes Départementales, identifiées par les initiales RD ;
-les Routes Communales, identifiées par les initiales RC.
Article 5 : Sont classées dans la catégorie des Autoroutes et Voies Express, les routes aménagées par l'Etat pour recevoir une circulation automobile importante, et comportant deux voies de circulation, au minimum, dans chaque sens, séparées de façon quasi- continue par un terre-plein central ou des barrières de sécurité doubles ainsi qu'un nombre limité d'accès, et notamment, en ce qui concerne les autoroutes, aucune intersection à niveau avec toute autre route, et pour les voies express un faible nombre d'intersections à niveau avec toute autre route.
Article 6 : Sont classées dans la catégorie des Routes Nationales, les voies publiques reliant, directement, deux provinces.
Article 7 : Sont classées dans la catégorie des Routes Provinciales, les voies publiques reliant directement plusieurs départements à l'intérieur d'une province.
Article 8 : Sont classées dans la catégorie des Routes Départementales, les voies publiques reliant directement plusieurs localités à l'intérieur d'un même département.
Article 9 : Sont classées dans la catégorie des Routes Communales, les voies publiques reliant directement plusieurs points à l'intérieur d'une même commune.
Article 10 : Un arrêté du Premier Ministre, pris sur proposition du Ministre chargé des Infrastructures, définit les caractéristiques techniques et géométriques imposables à chaque catégorie de routes.
Chapitre III : De la délimitation des voies publiques
Article 11 : Toute voie publique fait l'objet d'une délimitation de son emprise, par un plan d'alignement.
Toute propriété privée comportant une construction dépassant les limites du plan d'alignement est soumise à une servitude d'alignement.
Les modalités de production des plans d'alignement sont fixées par voie réglementaire.
Article 12 : En l'absence de plan d'alignement d'une voie publique, ses limites ne peuvent s'étendre au-delà des distances suivantes :
-pour les Autoroutes et Voies Express, soixante mètres de part et d'autre de l'axe de la route ;
-pour les Routes Nationales, trente mètres de part et d'autre de l'axe de la route ;
-pour les routes provinciales, quinze mètres de part et d'autre de l'axe de la route ;
-pour les routes communales, cinq mètres de part et d'autre de l'axe de la route.
Article 13 : Les zones non aménagées, comprises dans l'emprise de la voie publique font partie du domaine public routier et demeurent de ce fait inaliénables et imprescriptibles.
Article 14 : Toute décision d'alignement entraînant l'élargissement d'une voie publique a pour effet d'incorporer définitivement, au domaine routier, le sol des propriétés non bâties situées dans les nouvelles limites de la voie publique ainsi déterminées.
Le droit du propriétaire riverain se résout en une indemnité fixée comme en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique.
La décision d'alignement entraînant l'élargissement d'une voie publique crée à la charge des terrains bâtis, lorsqu'il n'y a pas lieu de procéder à une expropriation pour cause d'utilité publique, une servitude de reculement.
Article 15 : Toute modification du tracé d'une route entraîne le déplacement des limites du domaine public.
TITRE II : DE L'ADMINISTRATION DU DOMAINE ROUTIER NATIONAL
Chapitre Ier : Des personnes compétentes pour administrer
Article 16 : L'Etat et les collectivités locales aménagent, entretiennent et gèrent les voies publiques dont ils sont propriétaires, conformément aux textes en vigueur.
Chapitre II : Des principes généraux régissant l'utilisation des voies publiques
Article 17 : Les voies publiques sont affectées à la circulation des personnes et des biens.
Leur utilisation est collective, libre, gratuite et égalitaire pour tous.
Toutefois, pour les nécessités de l'utilité publique, l'usage de certaines voies publiques peut être soumis à une réglementation particulière.
Article 18 : Les dépendances du domaine routier national peuvent faire l'objet d'une exploitation économique par la personne publique propriétaire, à condition que celle-ci soit compatible avec l'affectation principale de la dépendance considérée.
Article 19 : La personne publique gestionnaire d'une voie publique est tenue de l'entretenir et de s'assurer qu'elle répond de manière permanente à son affectation.
Chapitre III : Des règles particulières d'utilisation et de protection des voies publiques
Section 1 : De l'utilisation des voies publiques par les véhicules
Article 20 : En vue de préserver l'intégrité des voies publiques leur usage est réservé aux véhicules déclarés conformes aux prescriptions du Code de la Route, notamment en ce qui concerne les caractéristiques techniques relatives :
-au poids total autorisé en charge ;
-au poids à vide ;
-à la distance entre les essieux ;
-au gabarit.
Article 21 : Le contrôle du domaine routier s'effectue par :
-le contrôle technique périodique des véhicules ;
-le pesage routier ;
-les barrières de pluies et les barrières ponctuelles.
Section 2 : De l'occupation privative temporaire du domaine public routier
Article 22 : Nul ne peut, sans autorisation délivrée par l'autorité compétente et sans paiement d'une redevance instituée à cet effet, occuper à, titre privatif une dépendance du domaine routier national dans les limites excédant le droit d'usage qui appartient à tous.
Article 23 : L'autorisation d'occupation d'une dépendance du domaine routier est temporaire et révocable.
Elle est strictement personnelle et ne peut faire l'objet de cession que sur l'accord de l'autorité compétente.
Article 24 : L'autorisation d'occupation ne conféré pas de droit à la réalisation de travaux pouvant affecter l'intégrité de la dépendance domaniale occupée.
Article 25 : L'autorisation d'occupation avec ou sans emprise au sol est accordée par le Ministre chargé des Infrastructures lorsqu'il s'agit des routes nationales, routes provinciales, les autoroutes et voies express.
L'autorisation d'occupation avec ou sans emprise au sol est accordée par le Président du Conseil de la collectivité locale lorsqu'il s'agit des routes communales ou départementales.
Toute occupation privative du domaine public routier national avec emprise au sol fait l'objet d'une convention d'amodiation entre l'Etat ou la collectivité locale, selon la catégorie de la voie publique et l'occupant.
Dans tous les cas la durée de l'occupation ne peut excéder dix (10) ans.
Les modalités de délivrance de l'autorisation d'occupation sans emprise et de signature sont précisées par voie réglementaire.
Toutefois, les taxes et les pénalités liées à l'autorisation d'occupation sont arrêtées dans la loi de finances.
Article 26 : La délivrance de l'autorisation d'occupation temporaire est subordonnée au paiement de frais d'instruction de dossier.
Article 27 : Les autorisations d'occupation des dépendances du domaine routier national sont classées en trois catégories :
-l'autorisation de voirie ;
-l'autorisation de stationnement ;
-l'autorisation de rejet.
Article 28 : L'autorisation de voirie est délivrée pour une occupation du domaine routier par des objets, des ouvrages, des bâtis, des câbles, des conduites, des poteaux ou des aménagements spécifiques et nécessitant une emprise au sol.
Article 29 : L'autorisation de stationnement ou de dépôt est délivrée pour une occupation temporaire du domaine routier par des objets ou des ouvrages, sans emprise au sol.
Article 30 : L'autorisation de rejet est délivrée pour une utilisation du patrimoine routier national destinée à l'écoulement des eaux des riverains, à l'exception des eaux usées.
Article 31 : Le retrait de l'autorisation d'occupation ne peut intervenir que pour juste motif et ne donne droit à aucune indemnité.
Article 32 : Les infractions aux dispositions de la présente section sont constatées par des agents publics assermentés, en vue de poursuivre contre les occupants sans titre, le recouvrement des sommes correspondant aux redevances dont le Trésor Public a été frustré, le tout sans préjudice de la répression des contraventions de grande voirie.
Article 33 : Les personnes physiques ou morales qui réalisent des travaux d'intérêt particulier ou général occasionnant une dégradation de la voie publique sont tenues de la remettre en l'état, dans les délais et conditions fixés par l'autorité compétente.
Passé ce délai, les contrevenants s'exposent aux sanctions prévues par les dispositions des textes en vigueur.
Section 3 : De la protection des voies publiques
Article 34 : La dégradation du domaine routier par des actions ou travaux autres que ceux d'entretien est interdite, notamment :
-l'épandage sur une chaussée bitumée des hydrocarbures et des lubrifiants ou tout autre produit détergent ;
-la circulation en temps de pluie sur les routes en terre des véhicules dont le poids en charge dépasse 3,5 tonnes ;
-la destruction volontaire des équipements routiers ;
-l'occupation non autorisée de l'emprise de la route ;
-la réalisation à titre privée d'ouvrage sur l'emprise de la route sans autorisation;
-la réalisation des champs de cultures dans l'emprise de la route.
Article 35 : Est restreinte sur les routes en terre et en temps de pluies, la circulation des véhicules :
-dont le poids total en charge est au moins égal à 3,5 tonnes ;
-ayant une capacité au moins égale à 12 places assises autorisées.
Pour l'application des dispositions de l'alinéa ci-dessus, il peut être érigé, sur les routes en terre, des barrières de pluies destinées à faciliter les contrôles portant sur le respect des limitations de la circulation en temps de pluies.
Article 36 : Des opérations de pesage routier sont organisées sur le domaine routier national, en vue de contrôler la conformité aux normes relatives au poids total autorisé en charge et à la charge à l'essieu, pour tout véhicule dont le poids total en charge est supérieur à 3,5 tonnes.
Le pesage routier est effectué au niveau des stations de pesages fixes ou mobiles. Il est obligatoire sur toutes les routes comportant un dispositif de contrôle du poids et de la charge à l'essieu.
Tout conducteur d'un véhicule en surcharge est astreint au paiement d'une amende dont le taux est fixé par les textes en vigueur.
Chapitre IV : Du classement et du déclassement des routes
Article 37 : Toute route appartenant à l'Etat où à une collectivité locale et affectée à la circulation publique doit faire l'objet d'un arrêté de classement dans le domaine public routier. Ledit arrêté, pris par le Ministre chargé des Infrastructures, indique à laquelle des catégories prévues à l'article 4 ci-dessus, ladite route appartient.
Nonobstant les dispositions de l'alinéa précédent, toute route, propriété de l'Etat ou d'une collectivité locale, mise ou laissée à la disposition du public, fait partie du domaine public, même en l'absence d'un arrêté de classement.
Les modalités de classement et de désignation des voies publiques sont précisées par arrêté du Premier Ministre.
Article 38 : Le classement d'une route ne peut être prononcé que dans la mesure où les dépenses de son entretien ont été prévues dans la loi de finances de l'année où intervient le classement.
Article 39 : Le déclassement d'une route ne peut être prononcé qu'après sa désaffectation, par décret pris en Conseil des Ministres, sur proposition du Ministre des Travaux Publics.
La route déclassée fait partie du domaine privé de la personne publique propriétaire.
Article 40 : Un décret précise les conditions, critères et procédure de désaffectation et de déclassement des voies publiques.
TITRE III : DES DISPOSITIONS PENALES
Article 41 : Les infractions aux dispositions de la présente loi et des textes pris pour son application sont constatées par des agents publics assermentés, ayant qualité d'Officiers de Police Judiciaire et habilités à cet effet par le Ministre chargé des Infrastructures.
Article 42 : Sera puni d'une amende de soixante-quinze mille (75.000) francs à cent mille (100.000) francs par tonne excédentaire, assortie d'une immobilisation du véhicule, l'auteur d'un dépassement de poids total autorisé en charge, de poids total roulant autorisé et de la charge maximale par essieu, fixés par les dispositions des textes en vigueur.
Toute surcharge entraînera l'immobilisation du véhicule ou ensemble de véhicules jusqu'au déchargement de la charge excédentaire.
Les transporteurs récidivistes s'exposent au retrait de leur licence de transport par l’autorité compétente chargée des transports.
Article 43 : Sera puni d'une amende de cent mille (100.000) francs à cent cinquante mille (150.000) francs et d'une immobilisation du véhicule ou ensemble de véhicules, l'auteur de non-respect de gabarit réglementaire fixé par les dispositions des textes en vigueur.
Article 44 : Sera puni d'un emprisonnement de dix jours à un mois et d'une amende de trois cent mille (300.000) francs à cinq cent mille (500.000) francs, assortis d'une suspension du permis de conduire, ou de l'une de ces deux peines seulement, le conducteur qui aura refusé de conduire un véhicule ou ensemble de véhicules à la balance d'une station de pesage fixe ou mobile.
Article 45 : Sera puni d'un emprisonnement de trois mois et d'une amende de cinq cent mille (500.000) francs à un million (1.000.000) de francs, ou de l'une de ces deux peines seulement, tout auteur de falsification des documents de circulation relatifs aux poids et au gabarit des véhicules ou ensemble de véhicules.
Article 46 : Seront punis d'une amende de cent mille (100.000) francs à cent cinquante mille (150.000) francs et d'une injonction de remettre en état les lieux dans un délai de sept jours et sous astreinte de cinq cent (500) francs par jour de retard, les auteurs des infractions suivantes :
-le déversement ou le dépôt de tout produit ou objet dangereux dans l'emprise d'une voie publique ;
-la destruction ou la dégradation d'une dépendance du domaine public routier ;
-la réalisation à titre privatif d'un ouvrage dans l'emprise du domaine public, sans autorisation ou sans respect des normes techniques.
Article 47 : Sera puni d'un emprisormement de six mois et d'une amende de deux cent cinquante mille (250.000) francs à cinq cent mille (500.000), ou de l'une de ces deux peines seulement, quiconque aura refiisé de présenter les documents, de communiquer les renseignements ou de laisser effectuer des contrôles ou des investigations prévues par la présente loi et par ses textes d'application.
TITRE IV : DES DISPOSITIONS FINALES
Article 48 : Des textes réglementaires déterminent, en tant que de besoin, les dispositions de toute nature, nécessaires à l'application de la présente loi.
Article 49 : La présente loi, qui abroge l'ordonnance n°29/70 du 17 avril 1970 portant statut administratif et financier de la voirie nationale et toutes autres dispositions antérieures contraires, notamment celles de la loi n°13/2003 du 17 février 2005 portant protection du patrimoine routier, sera enregistrée, publiée au Journal Officiel et exécutée comme loi de la République.
Fait à Libreville, le 24 juillet 2023
Le Président de la République,
Chef de l'Etat
Ali BONGO ONDIMBA
Le Premier Ministre, Chef Du Gouvernement
Alain Claude BILIE-BY-NZE
Le Ministre des Traveaux Publics, de l’Equipement et des Infrastructures, chargé de la Connexion des Territoires
Toussaint KOUMA EMANE
Le Ministre d'Etat, Ministre de l'Intérieur
Lambert Noël MATHA
Le Ministre des Transports
Auguste Roger BIBAYE ITANDAS
Le Ministre de l'Economie et de la Relance
Nicole Janine Lydie ROBOTY épouse MBOU
Le Ministre du Budget et des Comptes Publics
Edith EKIRI MOUNOMBI épouse OYOUOMI