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JOURNAL OFFICIEL N°335 DU 1 FéVRIER 2017

Loi N° 024/2016 du 29/12/2016 fixant le régime juridique de la production, du transport et de la distribution de l'énergie électrique et de l'eau potable en République Gabonaise.


L’Assemblée Nationale et le Senat ont délibéré ;

Le Président de la République, Chef de l’Etat, Promulgue la loi dont la teneur suit :

 

Chapitre Ier: Des dispositions générales

Article 1er : La présente loi, prise en application des dispositions de l’article 47 de la Constitution, garantit le droit d’accès à l’énergie électrique et à l’eau potable. Ce droit est reconnu à tous dans le respect de l’égalité, de l’équité consacrée par les textes en vigueur.

La jouissance de ce droit est garantie par l’Etat.

Article 2 : Au sens de la présente loi et des textes pris pour son application, on entend par :

Affermage : contrat par lequel une personne publique ou autorité affermante charge une autre personne morale ou fermier de l’exploitation, sous sa responsabilité, d’un service public ou d’un ouvrage qui lui est remis. En contrepartie, le fermier verse une redevance à l’autorité affermante.

Concession : contrat par lequel une autorité délégante ou concédante charge un délégataire ou concessionnaire de concevoir, construire, financer, gérer et/ou maintenir un ouvrage et un service public à ses frais, avec ou sans subvention, avec ou sans garantie d’intérêt, et que l’on rémunère en lui confiant l’exploitation de l’ouvrage public ou l’exécution du service public avec le droit de percevoir des redevances sur les usagers de l’ouvrage ou sur ceux qui bénéficient du service public.

Délégation du service public : contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d’un service dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l’exploitation du service.

Exportation : transfert d’électricité et d’eau potable produite sur le territoire national, à une personne physique ou morale de droit privé ou public, et destinée à être mise en vente ou utilisée sur le marché d’un ou plusieurs pays étrangers.

Gérance : contrat par lequel une autorité délégante confie à un délégataire ou gérant la charge de gérer un service public en contrepartie d’un paiement. L’autorité délégante perçoit elle-même les redevances et verse au gérant une rémunération forfaitaire sans intéressement au résultat.

Importation : acquisition d’électricité et d’eau potable auprès d’une personne morale ou physique de droit public ou privé d’un pays étranger, destinée à être mise en vente ou utilisée sur le territoire national.

Interconnexion transfrontalière : ligne de transport ou de distribution qui traverse ou enjambe une frontière séparant les zones de souveraineté des Etats membres et qui relie les réseaux de transport et de distribution des zones de souveraineté des Etats membres.

Producteur indépendant toute personne physique ou morale de droit public ou privé bénéficiant d’une autorisation et qui assure la production de l’énergie électrique ou de l’eau potable à des fins commerciales.

Régie intéressée : contrat par lequel l’autorité contractante finance elle-même l’établissement d’un service public, mais en confie la gestion à une personne morale de droit public ou privé qui est rémunérée par l’autorité contractante, tout en étant intéressée par les résultats, que ce soit au regard des économies réalisées, des gains de productivité ou de l’amélioration de la qualité du service.

Service public de l’énergie électrique : activité d’intérêt général consistant à produire, transporter, distribuer, importer de l’énergie électrique sur l’ensemble du territoire national et assurer sous le contrôle de la puissance publique, par un organisme public ou privé.

Service public de l’eau potable : activité d’intérêt général assurée, sous le contrôle de la puissance publique, par un organisme public ou privé, consistant à produire, transporter, distribuer, traiter des eaux usées et importer des eaux embouteillées sur l’ensemble du territoire national.

Sources d’énergie renouvelables : les sources d’énergie non fossiles renouvelables naturellement ou par l’intervention d’une action humaine, notamment les énergies solaire, éolienne, géothermale, marémotrice, ainsi que l’énergie issue de la biomasse, du gaz de décharges, du gaz des stations d’épuration d’eaux usées et du biogaz.

Chapitre II : Du monopole

Article 3 : Relèvent du monopole de l’Etat, les activités de production, de transport, de commercialisation, d’importation et d’exportation de l’énergie électrique et d’eau potable.

L’Etat peut confier la réalisation ou la gestion de ces activités à une ou plusieurs personnes morales de droit gabonais, dans les conditions et selon les modalités fixées par la présente loi et les autres textes en vigueur.

La délégation de gestion se fait au moyen de toute forme de contrat, notamment la concession, l’affermage, la régie intéressée, la gérance, ou les partenariats public-privé.

Article 4 : Les contrats visés à l’article 3 ci-dessus ne sont pas cessibles. Leur durée est fixée de manière à permettre l’amortissement des installations, ils prévoient les conditions de leur suspension, caducité, révision et de leur révocation par l’autorité délégante.

Article 5 : Les contrats de délégation prévus à l’article 3 ci-dessus peuvent porter sur l’une des activités ci-après :

-la production, le transport, la distribution, la commercialisation, l’importation et l’exportation de l’énergie électrique ;

-la production, le transport, le stockage, la distribution, la commercialisation, l’importation et l’exportation de l’eau potable ;

-la maintenance des installations.

Article 6 : Par dérogation aux dispositions de l’article 3 ci-dessus, toute personne physique ou morale peut produire, transporter et distribuer de l’énergie électrique et de l’eau potable pour son usage exclusif, sous réserve, pour les installations à caractère commercial ou industriel, qu’elles soient réalisées conformément aux normes du service public et qu’une déclaration préalable soit faite à l’administration compétente dans les formes et conditions fixées par décret pris en Conseil des Ministres, sur proposition du Ministre chargé de l’énergie électrique et de l’eau potable.

Article 7 : Outre la dérogation prévue à l’article 6 ci-dessus, l’Etat peut autoriser :

-la création, à titre précaire et révocable, d’ouvrages énergétiques ou hydrauliques pour la desserte de tiers, en raison de l’inexistence ou de l’insuffisance, dans ta région concernée, de moyen appartenant au service public ;

-la production, la commercialisation, l’importation et l’exportation des eaux destinées et conditionnées pour la consommation humaine, ainsi que le prélèvement, le transport et le stockage de l’eau brute à des fins industrielles ou en vue d’un usage privé, dans les conditions et selon les modalités fixées par décret pris en Conseil des Ministres, sur proposition du Ministre chargé de l’énergie électrique et de l’eau potable.

Chapitre III : De la passation des contrats de délégation

Article 8 : Les contrats de délégation visés à l’article 3 de la présente loi sont passés après mise en concurrences des candidats conformément aux dispositions des textes en vigueur, entre l’Etat et le ou les délégataires visés par les articles 4 et 5 ci-dessus. Ces contrats comportent un ou plusieurs cahiers des charges qui en font partie intégrante.

Le soumissionnaire est désigné par décret pris en Conseil des Ministres sur proposition du Ministre chargé de l’énergie électrique et de l’eau potable.

Article 9 : L’Etat peut déléguer aux collectivités locales ou à tout autre organisme public ses prérogatives en matière d’exécution des contrats visés par la présente loi, par décret pris en Conseil des Ministres sur proposition conjointe du Ministre chargé de l’énergie électrique et de l’eau potable et du Ministre chargé de la tutelle des collectivités locales.

Article 10 : Les installations, les ouvrages et, d’une manière générale, les biens appartenant aux collectivités publiques affectées dans le cadre du contrat de délégation de service public de l’énergie électrique et de l’eau potable font partie du domaine public. Ils comportent des aménagements spéciaux adaptés au fonctionnement du service.

Ces biens bénéficient du régime de protection de la domanialité publique.

Chapitre IV : Des droits et obligations du délégataire du service public

Article 11 : Pour l’accomplissement de sa mission, le délégataire du service public bénéficie des avantages concédés par l’autorité délégante.

Il peut notamment :

-occuper les dépendances du domaine public des collectivités publiques affectées à l’usage direct du public, en accord avec lesdites collectivités, dans le respect des clauses du cahier des charges et des lois et règlements édictés en matière d’urbanisme, de salubrité et de sécurité publiques ;

-solliciter le recours aux procédures d’expropriation pour cause d’utilité publique ou visant à la création de servitudes d’utilité publique contre les propriétés privées, conformément aux lois et règlements en vigueur.

Article 12 : Les propriétaires des moyens de production, de transport ou de distribution visés aux articles 6 et 7 ci-dessus doivent vendre au délégataire leur production excédentaire, et autoriser l’utilisation de leurs propres réseaux.

En cas de désaccord, il est procédé aux arbitrages et, le cas échéant, à la procédure de réquisition, dans les formes et conditions fixées par les dispositions des textes en vigueur.

Article 13 : Toute forme de prélèvement de la ressource en eau pour la production de l’énergie électrique et de l’eau potable, notamment par le captage des eaux brutes de surface et souterraines, en vue de l’alimentation d’une usine de traitement ou d’un barrage hydroélectrique, donne lieu au versement à l’Etat ou à ses démembrements d’une redevance dont le montant est fixé dans le contrat.

Article 14 : Le délégataire du service public est élu, en contrepartie de l’usage des biens de retour, a l’obligation de verser à l’Etat ou à ses démembrements une redevance dont le montant est fixé dans le contrat en cours.

Chapitre V : Des dispositions transitoires, diverses et finales

Article 15 : Les contrats antérieurs dont l’amortissement des installations nécessaires aux activités déléguées n’est pas encore effectif feront l’objet d’une révision, conformément aux dispositions de la présente loi. Cette révision interviendra dans un délai n’excédant pas six (6) mois après la promulgation de la présente loi.

Article 16 : L’Etat est tenu de favoriser, par des mesures incitatives, le développement et la valorisation des énergies nouvelles et renouvelables par les producteurs indépendants et les délégataires de service public notamment, la biomasse, le solaire photovoltaïque, l’éolien et la petite hydraulique.

Les modalités d’application de ces mesures incitatives sont fixées par voie réglementaire.

Article 17 : Le cadre institutionnel du service public de l’énergie électrique et de l’eau potable comprend :

-le Gouvernement ;

-l’Autorité de régulation ;

-les Organismes sous tutelle ;

-les Collectivités locales.

Les missions de ces institutions sont définies par les textes en vigueur.

Article 18 : Aux fins d’application de la présente loi, l’Etat peut créer tout comité ou organisme, permanent ou non, dont les missions et l’organisation sont déterminées par voie réglementaire.

Article 19 : Les conditions d’importation et d’exportation de l’énergie électrique et de l’eau potable sont fixées par décret pris en Conseil des Ministres, sur proposition du Ministre chargé de l’énergie électrique et de l’eau potable.

Article 20 : L’Etat veille à l’efficacité énergétique à travers des mesures réglementaires visant l’utilisation rationnelle et appropriée de l’énergie électrique et de la consommation d’eau, ainsi que l’utilisation des appareils et équipements électriques.

Il en est de même pour la qualité de l’énergie électrique et de l’eau potable.

Article 21 : Les contrevenants aux dispositions de la présente loi sont punis d’une amende de un million à cinquante millions de FCFA.

En cas de récidive, la peine est portée au double.

Article 22 : Des textes réglementaires déterminent, en tant que de besoin, les dispositions de toute nature nécessaires à l’application de la présente loi.

Article 23 : La présente loi, qui abroge toutes dispositions antérieures contraires, notamment la loi n°08/93 du 7 avril 1993 fixant le régime juridique de la production, du transport et de la distribution de l’eau potable et de l’énergie électrique, sera enregistrée, publiée selon la procédure d’urgence et exécutée comme loi de l’Etat.

Fait à Libreville, le 29 décembre 2016

 

Par le Président de la République,

Chef de l’Etat

Ali BONGO ONDIMBA

 

Le Premier Ministre, Chef du Gouvernement

Emmanuel ISSOZE NGONDET

 

Le Ministre d’Etat, Ministre de l’Eau et de l’Energie

Guy Bertrand MAPANGOU

 

Le Ministre de l’Intérieur, de la Sécurité Publique et de l’Hygiène Publique, chargé de la Décentralisation et du Développement Local

Lambert Noël MATHA

 

Le Ministre de l’Economie, de la Prospective et de la Programmation du Développement

Régis IMMOGAULT TATANGANI

 

Le Ministre du Budget et des Comptes Publics

Mathias OTOUNGA OSSIBADJOUO

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